Fondation Blachère, villes rêvées villes vécues


La fondation Blachère poursuit cet été la mission qu’elle s’est donnée, à savoir rendre témoignage de propos artistiques émanant du continent africain, avec modestie et simplicité. Démarche respectable de citoyens du monde.
Citoyens du monde, les artistes présents dans l’exposition le sont aussi ou aimeraient le devenir. Leur vision de la ville occidentale ou africaine, contemporaine ou futuriste en témoigne. Bodys Kingelez (République démocratique du Congo) avec ses maquettes futuristes et/ou fantaisistes émet des suggestions, tandis que Titus Matiyane (Afrique du Sud) fait un constat avec un grand panorama à partir duquel on embrasse d’un regard la ville et ses contours, son petit aéroport, la grande forêt qui l’entoure et les frontières au loin. Antonio Ole (Angola) s’attache à rendre la présence des bidonvilles. Mamadou Cissé (Sénégal) dessine au feutre des vues du ciel de villes tellement hyper-urbaines qu’elles en deviennent non identifiables, interchangeables et si abstraites sous sa plume qu’on ne finit par voir qu’une immense tapisserie colorée.
Mais deux propositions se détachent à notre avis de l’ensemble. Celle de Jems Robert Kokobi (Côte d’Ivoire) qui dans deux morceaux de bois modestement taillés, présente la ville qu’il pourrait habiter et le village de cases où il vit, ce dernier disant toute l’humanité et la sociabilité peuvant exister dans ce petit groupement humain.
A l’opposé, la maquette de Manhattan et des Twin Towers, de plusieurs mètres carrés de  Maxwell Osei Abeyie (Ghana) décrit l’Horreur ainsi que la vulnérabilité d’une ville modèle et symbolique. L’ampleur du drame, l’impossibilité d’y croire imposant de réanalyser l’ensemble par la reconstitution des lieux et des faits, en trois dimensions et dans une taille imposante. Un moyen à valeur thérapeutique de se libérer du traumatisme ; la mise en oeuvre que l’on peut qualifier d’enfantine, de naïve, permettant de ne pas revivre émotionnellement le drame, à la différence des images télévisuelles. Cette oeuvre fascine le public qui ne peut s’empêcher de tourner longtemps autour, sans jamais vraiment s’en détacher comme se fut le cas des images de télévision que nous regardions en boucle, dans un état de sidération.

Olivia Gazzano

Fondation Blachère, Villes, exposition jusqu’au 8 octobre.

Paru dans Prosper, le Magazine culturel, Vaucluse, Avignon, Drôme provençale, Alpilles. N° 26, juillet, août, septembre 2011.

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